jeudi 9 avril 2009

Le droit d'aînesse

Plusieurs fois j’ai fait allusion à elle.
J’avais prévu depuis un moment déjà de t’en parler, de te la raconter.
Aujourd’hui je passe à l’acte : je parle de ma grande sœur.

(Alors, toi, justement, ma grande sœur, ne lis pas ces lignes. Elles ne t’apprendront rien que tu ne saches déjà, et, en plus, telle que je te connais, tu vas avoir la larme à l’œil.)

Nous sommes 4 enfants. Elle est l’aînée, je suis la 3ème. Entre nous deux, un garçon et après moi encore une fille.
Tu y es lecteur ? Tu suis ? Elle, Lui, Moi, l’Autre…. Ok ?
5 ans nous séparent. En fait, 6 ans si on se fie aux millésimes, mais elle de fin décembre moi de mi-janvier, ça ne fait que 5 ans.

Elle m’a beaucoup énervée quand j’étais plus petite.
Imagine-toi qu’un jour, à l’école, elle avait appris ce qu’est le « droit d’aînesse ». Alors pendant un moment (en vrai elle a dû se servir de ça quelques jours, quelques semaines au plus, mais quand on est petit, c’est très long !) elle nous a balancé son droit d’aînesse chaque fois qu’elle voulait faire sa loi.

Mais il y avait pire que ça ! Oh ! Oui ! Bien pire !...
(Ahah ! T’aimerais bien que j’aille plus vite, hein ?.... Tuttuttutt.. On ne saute pas de ligne !!)

Le pire pour moi c’est qu’elle était : sage, obéissante, et les cheveux toujours à leur place….

Sage et obéissante : ce n’est pas une vue de l’esprit ! Ma mère n’a pas arrêté de me dire « Ta sœur n’aurait pas fait ceci ! Ta sœur n’aurait pas dit cela ! » et elle me la servait en exemple à tous bouts de champs.
C’est agaçant non ?

Les cheveux toujours à leur place : Ah ! Les longs cheveux raides de ma sœur ! Avant de partir à l’école, elle brossait ses cheveux, les démêlait, puis des deux mains, elle les ramenait en arrière, bien à plat dans son dos. C’était magique….
Plus magique encore quand elle rentrait : pas un cheveu qui n’était pas bien lisse, tombant bien droit sur son dos…. Pas un cheveu n’avait bougé…. Sans barrettes, rien !
Pendant ce temps, ma mère s’acharnait à me faire des nattes (en tirant bien, au démêlage comme au coiffage) qu’elle repliait en « balançoires », ce qui n’empêchaient nullement les friselis de s’échapper et de me faire une tête de folle en moins d’une heure.
C’est agaçant, non ?

Sérieuse, appliquée, quand j’étais toujours à rire et ne rien prendre au sérieux.
Longue, mince, sportive….
Adolescente, je l’ai énormément admirée, moi la boulotte aux cheveux toujours en bataille.

Son amour fut, dès le début, béni des Dieux… d’un au moins… Il était enfant de chœur (son amoureux, pas dieu !) … Sa foi s’en trouva renforcée, et aller à la messe le dimanche n’était plus si casse-pieds.

L’enfant de chœur devint un charmant jeune homme, un étudiant….
Ah ! Tu ne peux savoir lecteur ce que ce terme signifiait chez nous…. Porteur de tous les maux de la société de l’époque… La chienlit… Et ses cheveux longs !... (enfin, pas si longs en vrai, mais beaucoup trop pour mon père !)

Un jour de septembre, ils s’épousèrent.
Un jour d’avril, ils eurent une première fille.
Un jour de décembre un garçon montra le bout de son né.
La dernière attendit que l’an neuf soit fêté pour arriver à son tour (Même pas la bonne idée de filer un coup pouce à ses parents question impôts !).

Plus de 30 ans après, ils sont toujours ensemble.
Leur aînée leur a fait cadeau d’une petite-fille, et leur promet un autre petit pour la fin de l’été. Le second est devenu le papa d’une pépette.
La 3ème assure dans un grand hebdomadaire national….

J’exerce le même métier qu’elle.
Et j’ose dire fort, et écrire à la face du monde (quasiment) que le jour où je me sentirai aussi efficace qu’elle, ce jour-là, lecteur, je serai une vraie bonne prof !

Pour autant, je ne voudrais pas t’illusionner, lecteur, et comme il n’est pas question ici de lui dresser un trône en or massif, je vais tout de même casser un peu le mythe.

Le Héros, arrivé tardivement dans ma vie, ne connaissait pas ma sœur (ni ma mère, ni mon père, ni mon frère, ni ….)
Je lui parlais d’elle avec toute mon admiration, lui répétant souvent comme je la trouvais belle.Or, sa fille, (à ma sœur ! faut suivre dis donc !) ma filleule vint à se marier. Le Héros et moi étions invités.

Un rien inquiétant de présenter l’homme de sa deuxième vie à toute sa famille d’un seul coup réunie pour un mariage… Je ne le sentais pas bien ce moment…
C’est pourquoi nous sommes arrivés chez elle la veille au soir.

Rappelle-toi lecteur, que je disais au Héros combien ma sœur était belle… Et que le Héros, se fiant à moi, se préparait à rencontrer la plus belle femme du monde !

Oui, mais ma sœur, elle est modeste, et ce jour-là, elle avait décidé de descendre du piédestal sur lequel elle ne savait pas que je l’avais placée…

Quand nous entrâmes dans sa belle demeure, elle était de dos, dans sa cuisine.

Pas coiffée.

En pantoufles de peluche rosâtres qui avait connu des jours meilleurs, un peu avachies (les pantoufles !).

Vêtue d’un peignoir aux couleurs indéfinissables….

Une minerve autour du cou….

Tu imagines sans peine la tête du Héros !!

Sans doute ne voulait-elle pas que le Héros la prit pour une princesse…

Ce qu’elle redevint dès le lendemain quand elle apparut, fraîche, coiffée, chaussée et habillée pour tenir dignement et bellement le rôle de la mère de la mariée !
Le jour du mariage elle avait repris sa juste place !

Plein d’autres souvenirs : dans une colo où elle travaillait ; sa trouille juste avant son départ pour un voyage vers les USA, en avion, (ce soir-là, à la télé passait justement « 747 en détresse»), un repas et l’évocation de notre enfance à cause d’une compote de pommes, son goût prononcé pour la salade de pommes de terre, etc.

Mais ce serait trop long....

Je tenais à te la raconter, ma sœur, lecteur. Nous vivons à des centaines de kilomètres l’une de l’autre. Nous arrivons à nous voir une fois par an, guère plus. Mais il ne se passe pas une semaine sans que nous nous parlions au téléphone.

Elle tient vraiment une place importante dans ma vie.

Elle est le pilier de la famille.

Et je l’en remercie.

Parce que dans la vraie je n’oserai jamais lui dire tout ça… (Dans la famille, on n'est pas du genre à se faire des déclarations d'amour... je suis sûre qu'on le regrettera quand il sera trop tard!)

(Alors je préviens : je parle de TOI, pas de moi. Non, tu n’as pas le droit d’évoquer dans les coms ma nuit sur ton paillasson et celui de ton voisin ; non tu ne peux pas raconter non plus comment je tentais (vainement) d’échapper à la corvée d’essuyage de la vaisselle….je m’en chargerai, un jour.)

Edit: dans les commentaires, tu noteras, lecteur, que ma soeur est émotive... Au point d'envoyer 2 fois le même message... N'a pas supporté tous ces souvenirs, toutes ses révélations....

Mais aussi, elle ne sait pas lire la consigne: je la prévenais en début de billet de ne pas lire....

Sois indulgent avec elle, lecteur.... Il te sera breaucoup pardonné si tu sais l'être!



3 commentaires:

  1. T'es vraiment chiante, depuis toute petite et bien sûr t'es en train de me faire chialer et rire et même temps ! Et j'ai cours dans 10 minutes !!!

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  2. T'es vraiment chiante, depuis toute petite et bien sûr t'es en train de me faire chialer et rire et même temps ! Et j'ai cours dans 10 minutes !!!

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  3. J'adoooore quand tu me dis des mots doux!!!

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